vendredi 29 mai 2009

Ryan Gander, les boîtes

Je me suis amusé à photographier et à convertir les images en texte pour lire tranquillement le contenu des boîtes et à étudier un peu mieux tout ça. Ce qui, je le suppose, est ce que Gander cherche à susciter.







Les listes sont souvent des descriptions d'objets en détail ou bien des descriptions d'images accompagnées de leurs mentions descriptives (dos de cartes postales ou noms de monuments et lieux ou anecdotes liées à leur découvertes ou obtention). Si ces listes sont associées à des boîtes dites alchimiques, ces listes contiennent souvent elles-même des contenants ou des vecteurs (des pailels de coctails, un dictaphone, de feuilles de papier pliées, carnet, disques, cadres, un sac en soie, une pile, etc...). Chaque ligne/entrée de la liste peut-être prise comme la clé de toutes les autres, ce qui fait beaucoup de possibilités de lecture ! Beaucoup d'axes d'éclairage ! Ce coté délirant et proliférant sonne comme du Borges mais appliqué à l'acte de création et aux objets, à l'écriture artistique comme écriture syntaxique et polysémique entre des images, des mots et des objets. On trouve d'ailleurs une clé, du moins un porte clé (car une seule ce serait trop simple et hypocrite).


1 Extrait de la liste d'une des boîtes :


• A large sachet of silica gel pellets used to prevent the contents of a container or package being damaged by moisture when left sealed over long periods of time.
• A packet containing 100 standard lollypop sticks.
• A half used standard roll of 3" wide black Gaffa tape.
• A cotton papier-mâché ball measuring 4cm in diameter.
• A solid beech children's building block, reproduced from the dimensions of a standardised Bruno Munari children's building block measuring 1.5 x 3 x 6cm.
• A sheet of 20 stickers measuring 10 x 7 cm incorporating the shapes of a star, a circle, a square and a triangle,
• A sheet of 20 stickers measuring 10 x 7 cm incorporating the shapes of a star, a circle a square and a trianale in the colours pink, blue, green, red and yellow.
• A jack made from cast steel taken from a game of Jacks.
• A small round disc shaped tablet 5cm in diameter, of tartan green fabric dye, produced by Dylon The co/our code of the tabletis A15.
• A small blackboard with a wooden frame surround measuring 15 x 22cm. One side is plain slate whilst the other has been etched with a 1 cm square graphical grid. There are no chalk markings on either side.
• A 12" square self-adhesive cork tile 3mm in thickness, broken down thé centre into two pièces.
• Three red cocktail straws, each 13cm in length.
• A small mercury thermometer measuring the température of its location in degrees Celsius. At the time the object was sealed within the Alchemy Box the température was 23 degrees Celsius exactly.
• A black and white stick of rock from a Victorian seaside town in North Wales called LIandudno. The label advises it may contain the colours E102, E122, E124 E129, E132, E133, E104, E150, E153 and E755.
• A standardised postcard measuring 6 x 4" from the City of Lyon, the front of which shows an image of Fresco No. 17 measuring 5700sqm in area. The reverse of the card reads 'Musée urbain Tony Garnier - Cité Tony Garnier, Lyon 8 eme, Abattoirs de la Mouche, Fresque No. 17'.
• An oversized postcard irom the séries Cul, Fold and Glue Models of modem architecture. The postcard produces a card model of Château de Saumur, Val de Loire, France.




Ce qui nous amène au travail de montage et de cubisme des points de vue multiples ou changeant d'échelles de façon très rapides et abruptes. On se perd dans l'imagination et la spéculation à partir d'objets minuscules ou anecdotiques, décrits dans des tirets faisant plusieurs lignes alors que d'autres objets sont de plus sobres ponctuations ("a conker")






Cette folie de contenir, d'enfermer redouble en fait ce que fait en permanence l'ordinateur qui contient textes ou fichiers comprenant eux-même des images, des mots, de la mise en forme, des fonctions, des oeuvres d'autres personnes, des mails, des idées d'oeuvres, des oeuvres reproduites, documentées, des .pdf d'expos, d'intentions, de plans, de souvenirs, de conférences Powerpoint contenant elles-même divers types de sources, etc... On trouve d'ailleurs souvent la mention de Adobe comme marque et comme identification de fichiers (illustrator ou PDF), ce qui évoque aussi ses petits morceaux de bois de "the New new alphabet". D'ailleurs, les objets-oeuvrs présentés à coté dna sles 2 expos sont aussi perceptibles comme des documents informatiques, ils contiennent des pouvoirs d'actions, sont dépliables et ouvrables, activables : les portes clés qui "absorbent les regards et les sons", les "boites alchimiques", le mobile "christmas according to", ou ces lettres au sol qui rappelle la page d'accueil de Google)








Ce qui pourrait devenir de la folie est ici humblement renvoyé à la littérature, plasticienne au sens ou on pourrait voir ses boîtes (façon Fluxus) et textes muraux comme un livre, mais autrement fabriqué : un volume et du texte portant tout deux une/des fictions. Ces livres affichés et objectivés sont aussi des versions domestiquées et digérées de l'art textuel-conceptuel monumental de Lawrence Wiener. Au lieu d'un enième néon ou texte mural, voici l'art et l'oeuvre pléthorique (le magasin de Ben) réduit, compréssé à l'état de cartel informatif, de feuille de salle collée au mur.



Cette façon joueuse et dandy (= faussement modeste) mais amusante évoque aussi le livre des oeuvres pas faite, des idées d'oeuvres de Edouard Levé, mais le livre d'artiste est ici fait main et rêvé et non devenu livre, ce qui apparait toujours une sanction sociale de noblesse et de réussite symbolique un peu vaine (ha l'artiste qui publie un livre!).

On reconnaitra aussi dans ses objets des choses déjà vus ou connus ou alors des oeuvres à venir, ou bien des oeuvres d'autres, d'amis ou bien des références qui seront à l'origine d'oeuvres à venir ou l'occasion aussi de se cultiver et de chercher : aller voir le film youtube évoqué dans un des items.
Item vidéo qui renvoit encore une fois à l'hyperlien puisqu'il s'agit d'une vidéo sur une ville connue pour ses nombreux rond-points, ses interconnexions, à nouveau visibles dans la balade à vélo du galériste jouant Basquiat par ailleurs.





Si l'oeuvre est du texte, elle renvoit toujours néanmoins à autre chose, elle n'est pas pure poésie (façon Yoko Ono) Ce qui indique bien que Gander fonctionne dans une logique non affirmative et non-autoritaire mais dans un montage continu, comme JL Godard, il parle à travers les mots des autres. Gander fait fonction de portail, il est un portail qui filtre et redistribue l'info. Hautement post-moderne mais au style totalement domestiqué et intégré au biographique, puisqu'il peut aussi inclure l'évocation d'une carte d'anniversaire reçue de ses parents en mentionnant même leur message. Gander est dans le montage, il est la suture, la jonction, ou pour parler comme un logiciel : une fonction. Ryan Gander le fonctionnaire poétique de l'art contemporain, le logiciel de traitement de la sensation le plus avancé.







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